Tétraplégie / Spasticité

Spasticité du membre supérieur

Qu'est-ce que la spasticité du membre supérieur ?

La spasticité est un trouble moteur qui se manifeste par une augmentation anormale du tonus musculaire, également appelée hypertonie. Ce phénomène entraîne des contractions musculaires involontaires, souvent focalisées sur certains groupes musculaires, ce qui peut restreindre la mobilité du membre affecté. En plus de cette contraction excessive, la spasticité peut provoquer des rétractions musculaires et des restrictions au niveau des articulations concernées, rendant l’utilisation du membre plus difficile. Les personnes atteintes de spasticité peuvent également éprouver des mouvements involontaires et désordonnés, perturbant ainsi les gestes quotidiens.

Quelles sont les causes d'une spasticité du membre supérieur ?

La spasticité résulte généralement d’une lésion du cerveau, bien qu’elle puisse également être causée par des atteintes de la moelle épinière (comme la tétraplégie) ou des nerfs périphériques. Selon son origine, la spasticité peut varier en intensité et en localisation, affectant de différentes manières les mouvements et la fonction musculaire.

L’une des principales causes de spasticité chez les enfants est la paralysie cérébrale, qui survient généralement lors de la naissance ou dans les deux premières années de vie. Autrefois appelée «infirmité motrice cérébrale (IMC)», cette pathologie affecte environ 2 % des naissances et est plus fréquente chez les prématurés. La paralysie cérébrale peut résulter d’un manque d’oxygénation cérébrale (anoxie), d’infections comme l’encéphalite, de malformations vasculaires, d’accidents vasculaires cérébraux (AVC) ou de traumatismes crâniens. Elle se manifeste par une spasticité localisée, parfois limitée à un côté du corps, un bras ou une jambe, (hémiplégie infantile), ou étendue aux quatre membres (quadriplégie ou quadriparésie).

Chez les adultes, l’accident vasculaire cérébral (AVC) est la principale cause de spasticité. Il s’agit soit d’une embolie cérébrale (souvent d’origine cardiaque), soit d’une malformation ou d’un vieillissement des artères du cerveau (artériosclérose), qui provoquent un saignement ou une thrombose, responsables de lésions irréversibles des tissus cérébraux. Environ 20 % des AVC entraînent des troubles spastiques, qui peuvent varier en fonction de l’étendue des lésions cérébrales. La spasticité post-AVC peut affecter diverses parties du corps, entraînant des raideurs musculaires et des mouvements limités.

Les traumatismes crâniens sévères, résultant par exemple d’un accident de la circulation, d’une chute ou d’un plongeon dans une eau peu profonde, peuvent aussi provoquer des dégâts irréversibles du tissu cérébral. Une spasticité sévère avec des déformations importantes peut se développer dans les mois qui suivent le traumatisme.

La tétraplégie, qui résulte d’une lésion de la moelle épinière à l’intérieur de la colonne vertébrale, peut également être une source de spasticité, principalement au niveau des membres inférieurs. La tétraplégie est le plus souvent due à un traumatisme, tels que des chutes de hauteur ou des accidents de la route.

Enfin, des maladies neurologiques chroniques, comme la sclérose en plaques, sont également des causes courantes de spasticité. Cette condition neurodégénérative peut provoquer une spasticité progressive et affecter la mobilité des patients au fil du temps.

Ainsi, bien que la spasticité puisse être causée par diverses pathologies et traumatismes, elle reste un trouble complexe qui nécessite une prise en charge adaptée à chaque patient.

Quels sont les symptômes de la spasticité du membre supérieur ?

La spasticité est une condition neurologique qui affecte principalement certains groupes musculaires, provoquant une rigidité ou une hypertonie musculaire. Cette rigidité ne concerne pas tous les muscles de manière uniforme, mais se concentre souvent sur ceux qui rapprochent le bras du corps (créant ainsi une déformation en « adduction »), ainsi que ceux impliqués dans la flexion du coude, du poignet et des doigts. Elle peut également toucher les muscles responsables de la rotation interne du poignet et de la main, entraînant des déformations spécifiques, souvent qualifiées de « flexion-pronation ». Les muscles non spastiques (extenseurs, abducteurs, supinateurs) peuvent être faibles, ou paralysés.

La spasticité est élastique.
Une caractéristique essentielle de la spasticité est son élasticité : plus on tente de corriger la position ou de relâcher le muscle spastique, plus la résistance augmente au départ. Cependant, cette rigidité finit par céder, permettant d’étendre l’articulation affectée, à condition qu’il n’y ait pas de rétraction musculaire supplémentaire ou de fibrose dans les tissus concernés.

Les réflexes ostéo-tendineux des muscles touchés par la spasticité sont souvent amplifiés, entraînant parfois des phénomènes tels que des clonus – des contractions musculaires involontaires et rythmiques, qui peuvent survenir lorsqu’un réflexe est stimulé de manière excessive.

La spasticité est variable
La spasticité varie considérablement d’un individu à l’autre et peut fluctuer tout au long de la journée. Elle a tendance à s’aggraver avec certains facteurs comme la fatigue, le stress, ou une exposition au froid. Au repos, la spasticité peut se réduire, et dans certains cas, elle disparaît complètement pendant le sommeil.

Illustration de la déformation du bras en cas de spasticité du membre supérieur

Quels sont les examens à réaliser en cas de spasticité ?

L’évaluation clinique constitue la première étape essentielle pour diagnostiquer et classifier les déformations liées à la spasticité. Ce processus permet d’analyser en détail l’intensité de l’hypertonie, les rétractions, les raideurs, ainsi que la présence éventuelle de paralysies.

Lors de l’examen, le médecin observe la position spontanée du bras, les mouvements actifs et passifs du patient, évalue la force musculaire et identifie les zones d’hypertonie. Ces observations fournissent des informations précieuses pour comprendre l’ampleur du trouble. Afin de suivre de manière précise l’évolution de la condition, des vidéos peuvent être utilisées pour documenter l’état du patient avant et après chaque traitement, permettant ainsi de visualiser les améliorations ou les changements dans la fonction motrice.

Dans certains cas, des examens complémentaires peuvent être nécessaires pour affiner le diagnostic et orienter le choix thérapeutique. Parmi ces examens, l’électromyographie permet d’évaluer l’activité électrique des muscles et de détecter des anomalies de la transmission nerveuse. L’analyse du mouvement, quant à elle, aide à comprendre les troubles moteurs en observant les schémas de mouvement du patient. De plus, des blocs nerveux peuvent être réalisés pour tester la réponse des nerfs et déterminer le traitement le plus adapté en fonction de l’origine de la spasticité. Ces outils diagnostiques aident les professionnels de santé à élaborer un plan de soins personnalisé et à choisir la méthode de traitement la plus efficace.

Consultez l’un de nos spécialistes des pathologies des membres supérieurs :

Prendre RDV

Quel est le traitement adapté à la spasticité ?

Tous les patients souffrant de spasticité n’ont pas besoin de traitement. En effet, l’intervention thérapeutique devient nécessaire lorsque la spasticité entraîne des déformations ou des difficultés fonctionnelles significatives, affectant la qualité de vie et l’autonomie du patient.

Le choix du traitement doit être discuté avec le patient et sa famille, en prenant en compte l’avis des différents professionnels de santé impliqués dans la prise en charge. Cela inclut le médecin traitant, le neurologue, le médecin en réadaptation, ainsi que les kinésithérapeutes, ergothérapeutes, psychologues et chirurgiens. En raison de la nature souvent chronique de la spasticité, un traitement de longue durée est fréquemment requis, et l’engagement du patient ainsi que de sa famille est essentielle pour garantir l’efficacité de la prise en charge.

Rééducation : kinésithérapie et ergothérapie
La rééducation représente un aspect essentiel du traitement de la spasticité. La kinésithérapie a pour objectif de maintenir la souplesse musculaire, d’éviter l’apparition d’enraidissement et de renforcer les muscles affaiblis afin de prévenir les déformations. En parallèle, l’ergothérapie vise à encourager l’utilisation fonctionnelle du bras et de la main, en cherchant à maintenir au maximum les capacités fonctionnelles du patient. Les thérapeutes insistent souvent sur l’importance des activités bimanuelles, qui nécessitent l’implication des deux membres supérieurs pour accomplir certaines tâches, et ainsi optimiser les capacités motrices.

Attelles et orthèses
Les attelles et orthèses constituent des outils précieux pour compléter les efforts de rééducation. Elles sont spécialement conçues pour prévenir ou réduire les déformations musculaires, en apportant un soutien extérieur aux zones affectées par la spasticité. Ces dispositifs sont fabriqués sur mesure pour s’adapter parfaitement à la morphologie du patient et sont généralement portés la nuit, afin d’encourager l’utilisation de la main pendant la journée.

Médicaments anti-spasmodiques
En complément de la rééducation, divers médicaments peuvent être prescrits pour traiter la spasticité. Lorsque la spasticité est diffuse, des traitements tels que le baclofène, le dantrolène ou la gabapentine peuvent être employés pour réduire les symptômes. Toutefois, ces médicaments comportent parfois des effets secondaires indésirables, notamment de la somnolence ou des risques de toxicité hépatique. Les pompes à baclofène délivrent une quantité fixe du produit chaque jour, pour un effet à long terme.

La toxine botulinique constitue une option de traitement efficace pour traiter certains cas de spasticité musculaire localisée. En injectant directement la toxine dans les muscles concernés à l’aide d’une seringue, on bloque momentanément la transmission des signaux nerveux vers ces muscles, ce qui les rend temporairement plus faibles et réduit la spasticité. L’effet du traitement commence généralement après quelques jours et dure de trois à cinq mois. Ce traitement est réversible, et la spasticité revient progressivement une fois l’effet dissipé. La toxine botulinique est particulièrement utile lorsque la spasticité d’un muscle gêne considérablement la fonction du patient, provoque des douleurs ou empêche des soins de nursing. Elle peut aussi être utilisée avant une intervention chirurgicale pour évaluer les effets potentiels de l’opération.

Les blocs moteurs peuvent être utilisés comme outil diagnostique pour déterminer la meilleure approche thérapeutique. Un produit anesthésiant est injecté directement sur le nerf moteur, bloquant temporairement l’influx nerveux et réduisant la spasticité pendant quelques heures. Cela permet aux médecins d’observer la réponse du muscle, d’évaluer les rétractions et les raideurs, et de mieux planifier le traitement à suivre, que ce soit par des méthodes conservatrices ou chirurgicales.

 

En quoi consiste le traitement chirurgical de la spasticité ?

La chirurgie, bien que parfois nécessaire, n’est indiquée que pour certains patients. Elle est décidée en fonction de plusieurs facteurs, tels que la gravité des déformations, les besoins fonctionnels spécifiques du patient, et l’environnement disponible, notamment en matière de soutien familial et de rééducation. Les décisions sont prises collectivement, impliquant non seulement le patient et sa famille, mais également tous les professionnels de santé qui participent à son suivi.

Idéalement, l’objectif principal de la chirurgie est généralement d’améliorer la fonction du membre supérieur, particulièrement la capacité à saisir, manipuler et relâcher des objets. Cependant, dans les cas graves, cette amélioration fonctionnelle n’est souvent pas réalisable. Dans ces situations, la chirurgie peut offrir une aide significative en corrigeant les déformations sévères, en facilitant des tâches quotidiennes comme l’hygiène ou le nursing, ou en supprimant les douleurs persistantes. Pour certains patients, en particulier les adolescents, l’aspect esthétique et social de la chirurgie peut être une motivation majeure, parfois même plus importante que l’amélioration fonctionnelle.

Il existe plusieurs types de techniques chirurgicales qui peuvent être utilisées de manière isolée ou combinée.

1) Neurotomie sélective
Cette intervention consiste à sectionner une partie spécifique du nerf moteur des muscles concernés afin de réduire la spasticité. Elle est peu invasive, ne nécessite pas d’immobilisation post-opératoire et permet de débuter la rééducation après environ 15 jours.

2) Libération des rétractions musculaires
Lorsque les muscles sont rétractés, plusieurs techniques peuvent être utilisées pour les libérer, dont :

  • Détachement du muscle de son insertion osseuse : cette méthode, appelée « désinsertion musculaire », consiste à détacher le muscle de son point d’attache sur l’os.
  • Ténotomie : elle consiste à sectionner le tendon au niveau distal pour libérer la tension musculaire.
  • Allongement fractionné à la jonction entre muscle et tendon.
  • STP (Superficial Tendon to Profound Tendon) : spécifiquement utilisé pour les fléchisseurs des doigts, cette technique consiste à allonger les tendons lorsqu’ils sont complètement rétractés dans la paume et non fonctionnels.STP (Superficial Tendon to Profound Tendon) en cas de spasticité de la main

Suite à ces interventions de libération des muscles, le membre est généralement immobilisé dans une attelle pendant environ 4 semaines pour permettre une récupération optimale.

3) Transferts tendineux
Dans cette procédure, un tendon actif d’un autre muscle est déplacé pour remplacer celui d’un muscle paralysé. Après l’opération, une immobilisation dans un plâtre est nécessaire pendant 4 semaines avant de commencer une rééducation, qui dure généralement entre 2 à 3 mois. Cette rééducation est essentielle au succès de l’opération.

4) Autres:
Dans des situations particulières, d’autres techniques peuvent être employées pour améliorer la fonction et la mobilité des membres supérieurs :

  • Arthrodèse : cette intervention consiste à bloquer une articulation. On l’utilise surtout au niveau du poignet pour corriger les déformations sévères. Parfois, des arthrodèses du pouce sont également réalisées.
  • Arthrolyse : elle consiste à libérer une articulation qui est devenue rigide malgré des efforts de rééducation et l’utilisation d’orthèses. Un suivi de rééducation intensif est nécessaire pour prévenir toute récidive.
  • Stabilisation articulaire : Chez l’enfant, certaines articulations des doigts peuvent devenir hyperlaxes du fait du déséquilibre musculaire (col de cygne, hyperextension). La stabilisation consiste à renforcer les ligaments articulaires, à rééquilibrer les tendons, et, si nécessaire, à réaliser une arthrodèse.

Il est important de souligner qu’aucune de ces interventions chirurgicales ne permet de restaurer une fonction « normale » de la main. La main sera au mieux une main d’appoint, et les patients ainsi que leurs familles doivent être conscients de ces limitations et avoir des attentes réalistes vis-à-vis de l’opération. Bien que ces chirurgies offrent une aide précieuse, elles ne rétablissent pas une main parfaitement fonctionnelle et nécessitent une rééducation soigneuse pour maximiser les résultats.

Découvrez nos publications scientifiques

En tant que spécialistes des pathologies des membres supérieurs, nous publions le résultat de nos recherches dans les revues scientifiques de référence :